Marie Christine Laborie nous fait partager son coup de gueule envoyé au journal "Respublica"
La réponse qui lui est faîte montre que tout le monde n'a pas la même notion de la diversité culturelle. Certains confondent
"décentralisation type Chirac-Sarkozy" et lutte pour la reconnaissance des langues de France. Ils osent même écrire "l'offensive des langues régionales contre l'unité linguistique est également une arme de la mondialisation néo libérale pour faire éclater la République en mille morceaux." Si ils s'étaient promenés, le 22 Octobre 2005, dans les rues de Carcassonne, ils auraient été rassurés. Les Langues de france n'ont rien à voir avec leurs propos...


n°408 Mardi 27 Décembre 2005

LANGUES REGIONALES ET COMMUNAUTARISME

A/ Coup de gueule contre vous

Adichatz, bonjour,

Et voilà! Encore un vieux cliché qui nous tombe dessus... Je suis très déçue par votre dernier numéro, moi qui apprécie d'habitude les analyses sur l' ultralibéralisme. Les amoureux de leur langue presque maternelle, en l'occurence pour moi le béarnais, c'est à dire l'occitan, se voient traités de communautaristes...
Je suis militante d'Attac, donc altermondialiste, militante CGT, j'ai milité longtemps à Frères des Hommes et écrit un livre sur les Sans terre du Brésil. Or il se trouve QUE LE BEARNAIS EST EN MOI ET QUE NUL NE PEUT M ARRACHER CETTE LANGUE; AU NOM DE QUOI ?
Le grand Félix Castan a su défendre la langue sans provincialisme, avec l'ouverture au monde. Il y a belle lurette que les langues régionales ne constituent plus aucun danger pour la République !!! Vous retardez. Arrëtez de ringardiser, Hilhl de puta !
Défendre la diversité culturelle c'est s'opposer à l'uniformisation macdonale et nazdaquée. Même l'Unesco vient de voter en ce sens. Mes amis occitanistes sont loin d'être des réactionnaires, ou des anti républicains... certes il y a une mouvance mais ultra minoritaire qui correspond à votre description. Ils flirtent avec l'extrême droite. Mais, par pitié cessez l'amalgame ! Trop facile de s'en prendre toujours aux dérives.
Je viens d'éditer un conte fantastique sur le Carnaval occitan qui se veut un plaidoyer pour toutes les langues minoritaires du monde. (Les Aventures de Joan de Carnaval, Editions du greffier juin 2005 par Marie Christine Labourie)
Je suis progressiste, Tiers mondiste, altermondialiste et occitaniste. Et on en a marre d'entendre depuis philippe Val, en passant par les UMP ou les PS, ou les Républicains, jusqu'à certains d'Attac, que nous sommes des communautaristes.
Je suis en colère et je vous demande de revoir vos positions SECTAIRES.

Amistad. Adiu. (j'espère que ces derniers mots en occitan ne mettent pas en danger la République: il y a déjà eu des chants occitans de l'égalité pour défendre la République, je peux vous les envoyer, et un bouquin vient de sortir sur les Carnaval révolutionnaires de nos régions...).

par Marie-Christine Labourie (ou Maria Cristina Laboria)
B/ Réponse d'Evariste à Marie-Christine Labourie
Voila qu'ça r'commence...
Lorsqu'un républicain dénonce le communautarisme, le débat est contourné en déclarant qu'il s'en prend aux communautés, la figure est connue.
Lorsque Christian Gaudray dénonce la prise en compte de revendications identitaires dans les politiques publiques, en l'occurrence le fait d'imposer des langues régionales dans la sphère publique par les exécutifs régionaux sociaux-libéraux/verts, vous traduisez que l'on s'en prend aux cultures locales et aux particularismes linguistiques. Contournement à nouveau, qui évite de se lancer dans le vrai débat, celui du projet politique d'une Europe des régions, d'une gestion territoriale des inégalités, d'une segmentation du corps social sur des bases identitaires, et de la dissolution des solidarités nationales, qui contredisent le projet libéral.
Parlons de cela, et n'évoquons pas une prétendue attaque contre les langues régionales. Elles sont une richesse et font partie de notre patrimoine culturel national. Ceux qui, comme vous, oeuvrent à leur préservation et à leur promotion doivent être encouragés et soutenus. Mais il y a une ligne jaune, Marie-Christine Maria-Christiana : le bilinguisme officialisé. La langue qui unifie tout le monde, c'est le français, et seulement lui peut être considéré comme langue officielle et rassembleuse. Non aux langues régionales dans l'administration, non aux textes officiels écrits en français, et traduits en basque, en breton, en corse, en occitan, en kabyle, en créole, en alsacien, en arabe, etc. Non aux traducteurs régionalistes dans les administrations, non aux panneaux indicateurs écrits en deux langues, non aux écoles bretonnes Diwan dans la fonction publique, etc., comme le réclament divers mouvements régionalistes. Oui, il faut dénoncer l'utilisation à des fins électorales des instruments d'identification aux langues régionales pour créer un sentiment communautaire venant légitimer une politique, et Christian Gaudray a eu tout-à-fait raison de la faire dans Respublica 407.
Car c'est bien d'un projet politique dont il s'agit, et Alain Rousset l'a exposé comme tel dans une tribune du journal Le Monde le 8 décembre dernier. A l'en croire, les maux dont souffrent notre société ont une cause principale : le " verrou jacobin ". D'où sa réponse à la globalisation néolibérale : l'abandon du cadre national, forcément inefficient, et le recours au régionalisme comme nouvel horizon indépassable.
Dès lors, et afin de s'assurer un soutien populaire, les revendications identitaires sont instrumentalisées pour institutionnaliser la fracture territoriale.
Vous êtes militante d'Attac, soyez cohérente. Vous luttez contre la mondialisation neo-libérale, alors luttez contre le régionalisme diviseur qui fait éclater les structures publiques unifiées (voir le statut des Atoss dans l'Education nationale), arrêtez de nous faire passer pour des ennemis des libertés, ouvrez les yeux, et voyez que l'offensive des langues régionales contre l'unité linguistique est également une arme de la mondialisation néo libérale pour faire éclater la République en mille morceaux.